Francois GUIN et Le Caveau de La Huchette


C'est lors de mes études au Lycée Chaptal en 1956 que j'entends parler pour la première fois du Caveau de la Huchette et de son orchestre régulier Maxim SAURY.

 
 
 

C'est un camarade de classe qui, s'amusant à la récré à émettre des sons dans une embouchure de trompette, va faire ressurgir cette vieille passion pour les instruments à vent que j'observais avec avidité dans les fanfares.

Deux jours après, ce même Georges DARACQ m'emmène louer une trompette "modèle Armstrong" chez "Couillé-Pasdeloup", face au Jardin du Luxembourg, et dans les jours qui suivent, nous allons au Caveau de La Huchette écouter ce merveilleux orchestre de Maxim SAURY dont je ne savais pas encore qu'il jouait le style dit "Nouvelle-Orléans".

Rapidement, je joue dans l'orchestre du Lycée : "Les Wild Stompers" et mon prof de violon me prête un trombone à coulisse, instrument qui sera à l'origine de ma carrière de tromboniste.

Je fais alors la connaissance de Marc LAFFERRIERE au Baxter Club, une cave de la rue Chaptal, et nous jouons ensemble dès juin 1957, et c'est le 7 novembre de la même année que nous inaugurons le nouveau "Slow Club".

L'orchestre encore amateur, se nomme Marc LAFERRIERE et ses New-Orleans Stompers (qu'un ami musicien va surnommer "La fourrière et ses bassets", vu la taille de ses 3 soufflants qui ne dépassent pas la taille d' 1m65); Maxim SAURY qui est venu nous écouter nous demande de le remplacer au Caveau de La Huchette lorsqu'il part en gala avec son orchestre,... quelle promotion! ... nous ne sommes pas peu fiers.

Caveau de La Huchette encore, c'est un jeudi de décembre 1957 que j'ose, accompagné de Jean IRIGARAY, demander de "faire le boeuf" à Maxim SAURY...contents, mais on a serré les fesses...et on remet ça samedi!

   
Le Caveau de Huchette devient vite un lieu où j'aime beaucoup jouer, et  en juillet 1958, un jour où je joue avec le trompettiste Jean GAL, une photographe me mitraille et disparaît avant la pause...dommage, un coup raté...et en octobre, je comprends que ses grands sourires me signifiaient que le magazine "Votre Beauté" allait écrire un article sur "le bruit destructeur de beauté".

Décembre 1959, je rentre au service de "La Colo" qui devient "3ème Régiment d'Infanterie de Marine". Malgré ce service militaire, je fais mon entrée dès octobre 1961 dans l'orchestre de Jacques HELIAN. Je vais devoir jongler avec mes engagements civils et militaires, puis fin 1962, c'est "la quille"! J'intègre le quintette qui va accompagner Charles AZNAVOUR pour un long tour du monde, et fin 1964, ma carrière prend rapidement un visage auquel je ne m'attendais pas : le studio avec Jean-Claude PETIT, Daniel JANIN, Sylvie VARTAN...

Parallèlement, le jazz m'accapare de plus en plus. Raymond FONSEQUE me prend dans ses "T4" qui deviennent "Trombones Inc" (quatre trombones plus une section rythmique). Au Caveau de La Huchette, nous jouerons avec cet ensemble en juillet 1964, puis régulièrement de mars à juin 1965.

Le 9 juillet de cette même année, je remplace Michel CAMICAS dans l'orchestre de Maxim SAURY à La Huchette, et c'est peu après qu'il me cède sa place dans l'orchestre lorsqu'il part travailler en Italie.

Encore trois jours en décembre à La Huchette, et c'est le départ pour une tournée de quinze jours à Madagascar, La Réunion et l'Ile Maurice.Claude LUTER est l'invité de Maxim pour ce périple bien agréable.

Cette photo n'est pas prise à La Huchette, mais à notre arrivée à Tananarive (Madagascar) le 17 décembre 1966. Tout l'orchestre y est réuni : à gauche : Maxim SAURY (cl), au fond : Claude LUTER notre invité, du centre à droite : Guy RAY (cb), Robert PEGUET (dr), Gérard RAINGO (p), Xavier CHAMBON (tp), Francois GUIN (tb)

   

Toute l'année 1967 et jusqu'en mars 1968, je fais partie de cet orchestre avec lequel nous jouons régulièrement à La Huchette par période de cinq à six jours entre nos nombreux concerts.

C'est en octobre 1968 que je quitte (à reculons) l'orchestre de Maxim SAURY dans lequel j'ai passé de merveilleux moments ; j'ai en effet l'opportunité de créer mon propre orchestre Les Swingers, pour la réouverture du Club Saint Germain.

Durant les quatre mois de notre contrat dans ce club, le répertoire original, les orchestrations et le son des "soufflants" des Swingers ont fait leur originalité vite remarquée par le Show-Biz qui s'empressa de nous engager : Eddie BARCLAY pour les disques, quelques artistes pour des "riffs" sur leurs chansons, tels Jacques DUTRONC, Johnny HALLYDAY...


Monsieur GOREGUEZ
est à cette époque le célèbre patron du Caveau de La Huchette. Il ne me cache pas son désir de nous avoir dans son propre Club de Jazz. Il demande à Raymond FONSEQUE qui, depuis mars 1966 assure la programmation de son club, de nous y produire dès la fin de notre contrat au Club Saint Germain.




Les Swingers répètent à La Huchette en juin 1969  


Le Caveau de La Huchette nous accueille de mars à décembre 1969 pour six périodes de quinze jours ; tous les vendredis, relâche pour Les Swingers, ce sont Les Four Bones qui prennent la relève.


Les Swingers jouent à la Huchette en juin 1969 : Xavier   CHAMBON (tp), Teddy MARTIN (dr), Francois GUIN (tb), Ricardo   GALEAZZI, Gérard GAMBUS (p), Gérard BADINI (ts) 

A partir de là, la carrière des Swingers dans les clubs parisiens allait démarrer fort. c'est à cette même époque que le vibraphoniste Dany DORIZ rachète Le Caveau de La Huchette.







Les Swingers sous le Pont Notre-Dame, face à La Huchette 





Les Four Bones à La Huchette en juin 1966, photo de gauche :Raymond KATARZYNSKI, Luis FUENTES, Francois GUIN, Claude GOUSSET (tbs)

Après une absence d'une décennie et la fréquentation d'autres clubs de jazz : hellzapoppin, La Taverne des Champs, le Bilbolquet... c'est du 10 au 13 janvier 1979 que je retrouve Le Caveau de La Huchette, non pas avec Les Swingers mais avec Le Swing Quintet, en duo de trombones avec Benny VASSEUR. La section rythmique est composée de : Gérard RAINGO (p), Jean-Philippe VIRET (cb) et Christian GOUHIER (dr).

 

 

Le vendredi, avec cette formation, il était plus aisé de reconstituer Les Four Bones en y ajoutant deux autres trombones.


Photo ci-contre :
Charly ORIEUX (tb)
Benny VASSEUR (tb)
André PAQUINET (tb)
Francois GUIN (tb)
Gérard RAINGO (p)
Jean-Philippe VIRET (cb)
Christian GOUHIER (dr)








Photo ci-contre :
Les Four Bones dans le vent rue de la Huchette

  

 En juin 1980, c'est Michel CAMICAS (tb) qui remplace Benny VASSEUR dans le quintet, pour une semaine avec Jean COLOMBO (p), Ricardo GALEAZZI (cb), Bernard LAYE ou Franco MANZECCHI (dr).

En 1980 également, Dany DORIZ me demande d'écrire des arrangements pour son sextet dont je ferai partie et qu'il produit environ une semaine par mois au Caveau de La Huchette.

En 1981, alors qu'André PAQUINET est très pris par l'orchestre de variétés de Zurich, je découvre comme beaucoup Denis LELOUP un tromboniste très talentueux. Nous le prenons dans Les Four Bones, et commençons alors une saison très chargée au Caveau de La Huchette le 31 janvier 1983.

  

Les Four Bones en 1981 : Charly ORIEUX, Benny VASSEUR, Francois GUIN, Denis LELOUP.

En 1990, nous tenterons de reconstituer Les Swingers dans l'esprit des célèbres Jazz Messengers en reprenant certaines compositions de Benny GOLSON : Whisper not, I remenber Clifford, Blues march...

 
 
Photo de gauche : Lionel BELMONDO (ts), Stéphane BELMONDO (tp), Francois GUIN (tb), Jean-Pierre CHESNE (dr), Philippe DUCHEMIN (p), Pascal CHEBEL (cb)

En mai 1999 et février 2000, en l'absence de Benny, nous innovons une formule : Le Swing Quartet+Dany DORIZ (vibes), qui ajoute une couleur musicale permettant de nouveaux arrangements tels : Rockin' in rythm, Air mail special...
  
Février 2000 : Dany DORIZ (vibes), Philippe DUCHEMIN (p), Antoine REVIRON (tp), jeune argentonnais qui "fait le boeuf", Francois GUIN (tb), Patricia LEBEUGLE (cb), Jean-Pierre DEROUARD (dr)

Plusieurs sections rythmiques se relaieront quelque temps autour de Benny et moi :
  • Le trio Philippe MILANTA (p) avec Bruno ROUSSELET (cb) et Michel DENIS (dr)
  • Le trio Philippe DUCHEMIN (p) avec Pascal CHEBEL, puis Patricia LEBEUGLE (cb) et Jean-Pierre CHESNE, puis Jean-Pierre DEROUARD (dr), avant que Francois LAUDET n'en devienne le batteur régulier.
La chaine de télévision ANTENNE 2 est intervenue à deux reprises pour nous filmer lors de l'émission "Dimanche Martin" pour la rubrique "Entrez les Artistes" :
  • Le 21 janvier 1981, Francois GUIN Swing Quartet
  • Le 9 juin 1986, Francois GUIN et Les Four Bones
Anecdotique! je me souviens avec une certaine émotion de tous ces habitués du Caveau de La Huchette : Carlos (oui! lui!), Pâquerette, Ramon, Slim, Gigi... et tant d'autres qui dansaient merveilleusement le "be-bop" et faisaient le show sur notre musique ; nous les avons a ce point incrustés dans le cadre du Caveau qu'on avait fini par les appeler "Les pierres de La Huchette". Comment ne pas parler aussi d'Ignace, le si sympathique barman qui a toujours mis musiciens et clientèle de si bonne humeur !
Inoubliable Caveau de La Huchette qui depuis 1957 m'a fait vivre des moments musicaux exceptionnels. C'est un endroit très particulier, biscornu et pleins de dédales, qui cependant à une grande façade vers la petite scène exigüe où se produit l'orchestre. De là, il est aisé pour le leader de répondre aux voeux de son public : écouter ou danser, en adaptant ipso facto le répertoire approprié.
Un autre atout de cet endroit est d'être visité par une clientèle très cosmopolite.

C'est en 2005, encore une fois "à reculons", que j'ai renoncé à la fatigue du très tardif troisième set !

 

 Mes souvenirs soigneusement conservés et minutieusement notés dans les classeurs de ma vie musicale m'ont permis de renseignerChristian MARS pour la rédaction des pages 70 et 71 "FRICK-FRAC" CHEZ LES TROMBONES de cet ouvrage : 60 ANS DE JAZZ AU CAVEAU DE LA HUCHETTE www.editionsarchipel.com